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site d’Anne Savelli

Semaine #50 paradoxes

lundi 17 Décembre 2018, par Anne Savelli


(fenêtre de Marne-la-Vallée, bâtiment Copernic, UPEM)

La semaine aurait dû être plus dense, j’aurais dû dormir à Évry mardi soir, visiter la ville nouvelle le lendemain matin mais il y a eu du mouvement au lycée quelques jours plus tôt, manifs et poubelles brûlées, c’est pourquoi les sorties ont été repoussées à janvier. Je n’ai pas assisté au confinement des élèves dans le CDI le jeudi précédent, ai pu animer mon atelier le lundi comme d’habitude, mais pour le reste, nous verrons l’an prochain.
Mardi matin, Scène de la Maison de la poésie, formation auprès d’enseignants sur le thème "Travailler avec un écrivain". Ils sont cinquante devant moi. Je lis des extraits de mes livres, commence par

Laisse venir

puis j’enchaîne sur un texte qui revient sur les questions qui se posent, consciemment ou non, de l’enseignant à l’auteur, de l’auteur à l’enseignant, etc. Une discussion s’ensuit. Assise sur la scène, sans micro, j’ai l’impression alors, d’avoir retrouvé toute mon énergie, d’être au bon endroit, de pouvoir partager - j’apprendrais d’ailleurs à la fin que pour certains, m’écouter a des "vertus curatives" ! Une fois rentrée, pourtant, quelque chose se dégonfle, épuisé. J’essaye de me remettre à écrire, d’alterner Saint-Germain et Bruits, ça fourmille mais c’est chose purement mentale, je n’ai pas l’impression que ça avance.

Des oloé

À la fin de la semaine, je comprends pourquoi : c’est l’absence de publication cette année qui me fait cet effet. Je n’ai pas d’objet terminé à montrer, voire simplement à déposer, circonscrire quelque part. Je ne peux pas m’alléger. Du coup, je n’arrive pas à lire, non plus, autre chose que des fragments, articles, extraits, bouts de phrases... En même temps, c’est ce qu’il faut, pour la préparation de la Nuit de la lecture à la Vallée aux Loups, par exemple...

(Franz Kafka, Lettre à Milena)

C’est paradoxal : à la fois il se passe mille choses (les ateliers à Évry et à la fac de Marne-la-Vallée, cette Nuit de la lecture, le projet de maquette interactive qui avance, sans parler d’un texte pour le CNES que je dois écrire), et pourtant sans cesse m’est renvoyée l’immense inertie de ceux qui reçoivent mon livre achevé (VF), dont les seuls arguments sont économiques - et encore, tabou, ce n’est pas dit clairement. Jamais ne s’engage le moindre échange littéraire. Il n’y a pas de voix, rien qui se fasse entendre. Une partie de mon énergie passe à mettre à distance ce degré zéro, dont je ne peux totalement m’abstraire : la difficulté, c’est que je continue à vouloir, non seulement que ce texte existe, mais qu’en plus il soit traduit. En face, c’est pure nécrose, un monde mort.
Alors je lis De toutes pièces, de Cécile Portier. D’un seul trait. À la fin je respire.

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