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La vie normale

dimanche 28 Novembre 2021, par Anne Savelli

Continuer Bruits (le texte, le site, les deux) au lieu de faire systématiquement passer en premier l’administratif, le montage de dossiers pour L’Objet de ma vie et la préparation d’ateliers : voilà une promesse que je ne réussis à tenir, cette semaine, que le mercredi, ce qui est peu, bien sûr, je m’en rends compte le dimanche.

Cependant, mes trois premières heures du matin (de 6 heures à 8h59, dans Bruits) sont bouclées, même si je vais sans doute encore les retravailler. De plus, 9-10 que je croyais vide déborde d’idées et 10-11 est déjà en partie rédigé. Ne serait-ce pas le moment de se dire : et si j’avais terminé la première partie de mon roman (de 6h à 11h59) avant le début de l’année prochaine ? Je sais que c’est difficilement réalisable, d’autant que je n’ai toujours pas terminé mon texte pour le GREC (Groupement de Recherches sur l’Extrême Contemporain) de l’Université de Bari, en Italie, alors que je n’ai plus, en théorie que... deux jours pour le faire. Sans compter que la paperasse ne diminue pas vraiment, même si j’ai fixé une limite : ne m’en occuper que le lundi matin, aller nager ensuite.
(vœu pieu ? Cette semaine, oui, mais la semaine précédente, ça a fonctionné)

(livre utilisé en atelier "L’Objet de ma vie" avec masque déjà obsolète et couleurs qui jurent)

Ces jours prochains, je n’en aurai plus que pour ce texte à rendre pour la fac de Bari, top là. En attendant, en butte à un si grand nombre de chantiers, mon cerveau n’est, je crois, pas mécontent d’avoir au moins terminé la lecture d’un livre, en l’occurrence du dernier roman traduit en français de Dulce Maria Cardoso, Eliete, la vie normale. Fort intelligemment, l’autrice passe le livre à nous présenter son héroïne, Eliete, une quadragénaire mariée, mère de deux filles, "moyenne en tout" et, surtout, incapable en apparence d’aller au-delà de l’image qu’elle s’est construite d’elle-même. Comme toujours chez Cardoso (j’ai lu ses quatre livres traduits en français et me voilà déjà à faire des phrases définitives : help !), comme à chaque fois, donc, nous retrouvons ce qui fait son style : une suite de phrases longues, compactes, rythmées par des virgules et des remarques grinçantes, souvent drôles, qui nous plongent de façon crue dans la vie matérielle de ses personnages, lesquels sont peu épargnés (Eliete espionne les réseaux sociaux de sa famille, par exemple) mais aimés, et qui conservent une part de mystère.

(badge offert par une participante à un de mes ateliers, trouvé dans une librairie de cinéma de Bologne, m’a-t-elle dit : merci à elle !)

Pour la première fois, je me suis dit que l’écriture de Dulce Maria Cardoso pourrait être rapprochée de celle de Joyce Carol Oates, à laquelle je repensais ces jours-ci à cause de Blonde. Un style que j’aimerais maîtriser par moments, pour sa fluidité, sa vitesse, la liberté avec laquelle il s’empare du trivial, le relie au métaphysique. Mais il n’y a rien à faire, ma façon d’écrire diffère, je l’ai à nouveau réalisé en relisant des passages de Musée Marilyn pour un atelier.

Je me demande, en réalité, si je serais capable d’écrire sur "la vie normale". Dans Fenêtres, je ne racontais pas la vie de bureau, mais comment s’en échapper. Dans Franck et Cowboy Junkies, évidemment, c’est la marge qui faisait centre. Dans Décor Lafayette, au fond, on ne se rendait jamais dans le grand magasin. Dans Décor Daguerre, même, mon zoom avant sur la vie du petit commerce vu par Agnès Varda était si accentué (aller regarder à la loupe chaque image à l’arrêt) que le sujet, c’était moins le quotidien du boucher ou du boulanger que le regard, ses dérivations. Quant à Saint-Germain, comme dans mes autres textes en partie autobiographiques, il se fonde sur une part de non-dit plus importante que le récit lui-même. Sans parler de Dita Kepler...

Non, je n’arrive pas tout à fait à parler de la "vie normale", décidément, quand d’autres le font si bien. [1] Mais utiliser cette incapacité pour écrire mon texte à envoyer en Italie : ça se tente, peut-être ?

*

J’allais en finir là, sous-titrant mon article intitulé La vie normale par "ses objets, ses limites" quand est apparue une recension de Lisières Limites, texte sur l’écoquartier de Châtenay écrit avec Joachim Séné. L’article, signé de Karen Cayrat, publié dans le magazine Prop(r)ose, me fait, entre autres, le cadeau de valider mon pari (risqué, au moins pour moi-même) : partir de l’incipit des Choses, de Perec, pour développer ma partie du texte. Je suis très touchée de l’attention portée à ce livre numérique, ouvrage court mais dans lequel nous nous sommes beaucoup investis, Joachim et moi, ce qui n’a pas échappé à Karen Cayrat. J’en profite pour dire qu’elle vient d’ouvrir un site personnel, Dérivations , qui promet un journal mensuel : un rendez-vous de plus pour partir en exploration.

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[1(pour autant, me direz-vous, qu’ai-je fait d’autre en ce début de semainier, avec mes histoires de dossiers ?)

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