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Marilyn lisant / lisant Marilyn

dimanche 10 Septembre 2023, par Anne Savelli


(photo prise durant la rétrospective Marilyn Monroe à la Cinémathèque française l’an dernier)

La table ronde à laquelle je dois participer ce dimanche à Beaubourg, Une lectrice nommée Marilyn Monroe, me pousse à me replonger cette semaine dans le "corpus Marilyn". Mon livre est sorti il y a un an et je ne l’ai pas relu depuis bien plus longtemps encore : autant dire que les informations utilisées pour l’écrire ne sont plus, par moments, qu’un souvenir.

Il me faut choisir les extraits de Musée Marilyn que je lirai en public, puis les tester à voix haute plusieurs fois, puis les chronométrer. Tout cela prend déjà du temps. Je décide également de relire le livre que la militante féministe américaine Gloria Steinem a écrit dans les années 1980, Marilyn inconnue, en collaboration avec le photographe Georges Barris. Je ne m’en souvenais plus mais Barris, qui a pris les dernières photos de MM et fut un de ses amis proches, devait participer à son autobiographie. Il fut tellement traumatisé par le traitement médiatique de sa disparition (et, sans doute, les réactions du tout Hollywood) qu’il quitta les Etats-Unis et se réfugia Paris, où il resta vingt ans et où il fonda une famille.

Pourquoi je parle de ça ? Parce qu’en écrivant mon livre, je me suis aperçue que raconter une vie, c’est précisément dire, au bout d’un moment, comment cette vie en a influencé d’autres. Bien sûr, je n’ai pas pu me pencher en détail sur la biographie de chaque photographe — même si je l’ai fait avec Halsman, par exemple —, mais c’est quelque chose que j’ai retrouvé plus d’une fois.

Si Marilyn avait vécu, que se serait-il passé ensuite ? Que serait-elle devenue ? Voilà une des questions que se pose Steinem, que ce soit dans son livre où dans cet article du magazine Ms, pour lequel elle a reçu beaucoup de courrier venu, en particulier, de femmes. Les questions brassées sont celles que portent le féminisme depuis les années 60 (la nécessité de l’indépendance financière, que Marilyn a toujours revendiquée et dont elle était fière, mais aussi les violences sexuelles et sexistes, la discrimination au travail, etc).

Au passage, je vous conseille ce documentaire diffusé sur Arte en ce moment, où l’on aperçoit d’ailleurs au début une scène de La Rivière sans retour (mais pas celle à laquelle j’aurais spontanément pensé, où le personnage de Mitchum se jette littéralement sur elle) (On voit aussi des extraits du Bonheur d’Agnès Varda et de Jeanne Dielman de Chantal Akerman.)

Je lis et, passant de livre en sites, je me rappelle que Marilyn a dénoncé les porcs — qu’elle appelait les loups — alors que sa carrière n’était pas encore au plus haut. Je lis, je réfléchis à ce qui avance, n’avance pas, tout en écoutant Ovidie à la Maison de la poésie.

Je lis ce que Steinem dit de Marilyn lisant, des doutes sur la réalité de cette activité entretenus par les hommes côtoyant la star (Joseph Mankiewicz, par exemple). Elle faisait semblant de lire, disaient-ils. Je me demande : comment est-il possible qu’on s’intéresse encore cette question ? Serait-ce parce que l’image de la ravissante évaporée — surtout quand elle vient d’un milieu populaire, comme Norma Jeane —, refait perpétuellement surface, même aujourd’hui ?

La réponse est dans la question.

Je me souviens aussi de l’année Marilyn 2022, celui des 60 ans de sa disparition. Ci-dessus, par exemple, le réalisateur de Blonde, Andrew Dominik, que j’étais allée voir, interrogé par Séverine Danflous et par le propriétaire de la boutique de DVD Potemkine (entre Séverine et le réalisateur : la traductrice). Il n’a jamais été question de Blonde, sorti sur Netflix, durant la soirée. J’avoue que ce que j’ai surtout retenu, c’est son amitié avec Brad Pitt et Nick Cave, mais ceci est une autre histoire (la rencontre a été enregistrée).

Une drôle d’année, où j’ai fait à la fois peu et beaucoup autour de Musée Marilyn. Ce qui m’a certainement le plus marqué, c’est la soirée à Volvic, dans le tiers-lieu Les Vinzelles, avec la libraire Margot Bonvallet puis mon ami Christophe Basterra.
Les livres de l’an prochain (j’en sortirai deux, normalement) commencent à taper à la porte, requièrent mon attention. Il faudra bientôt les relire, les retravailler tout en continuant Bruits et commençant Delphines. Il faudra aussi, ce dimanche, repartir en arrière, retourner dans les années 1950, 60, 80, alors que la canicule refait surface, que le dôme de chaleur nous immobilise. Sous cloche, alors que tout flambe, parler d’une époque disparue, par moments je trouve cela dérisoire. Puis je lis, j’écoute, et me dis que non.

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