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Une voix

dimanche 24 Septembre 2023, par Anne Savelli

Avant tout : cette photo déjà ancienne d’un de mes lieux d’écriture. Ce jardin se trouve lui-même à l’intérieur d’un livre et c’est par cette mise en abîme très simple que j’aimerais commencer le semainier.

Lundi J’aimerais beaucoup te dire quelque chose, Lisa, quelque chose qui raconte celle que tu fus pour moi à travers nos liens de famille et l’espoir que j’ai eu, un jour, de te revoir, l’envie que j’ai eue de te parler, de savoir ce que tu étais devenue. Il aurait fallu retrouver ton nom dans l’annuaire, t’écrire une lettre, franchir l’océan. Je ne me suis pas autorisée à le faire, je n’ai pas cherché — mais si, j’ai tenté, une fois, je m’en souviens, un mail en anglais à un inconnu qui t’avait connue, disait-il. C’était loin. C’était flou. Ça n’avait rien donné. C’est trop tard, maintenant.

Tu aurais pu voir que je n’ai pas oublié cette carte d’anniversaire, que je l’ai conservée. J’aurais pu te dire que j’étais devenue écrivaine, j’aurais pu t’envoyer mes livres, soulignant, même : regarde, j’ai écrit sur Marilyn, sur la photographie, remember ? C’est trop tard, maintenant. À moins que ce ne soit le moment de commencer à te parler — de continuer, plutôt, car de mon côté, ce dialogue existe depuis longtemps.

Oublier. Couper les réseaux et les mails, rouvrir Bruits, remettre les décors en place, les étiquettes, les personnages. Ne pas s’empêcher le repos. Relire la partie en cours, ne pas s’affoler du travail de réécriture qui se présente, évident, les parties à changer, à replacer ailleurs — place, le nom commun insiste, ce jour — the place to be, ce serait où, dis-moi ? Là où je me souviens de toi, Lisa, là où je t’oublie pour écrire. J’allume une bougie comme on le fait partout, en tous lieux, façon pour les vivants de demander aux morts leur soutien gracile. C’est comme retrouver un jardin, couper le bruit du monde.

Mardi Il fallait, hier, écrire sur cette disparition pour pouvoir se remettre à Bruits. Reprendre les lectures. Inventer une nouvelle formule.

Mercredi L’énorme fatigue qui écrase, à nouveau, alors que je m’étais remise à écrire hier, ayant dormi dix heures, simplement parce que cette nuit, j’ai entendu les pas des nouveaux voisins, est-ce possible ? Lutter ou ne pas lutter, c’est pareil. Je me mets à lire Le Capital, c’est ta vie de Hugues Jallon que j’avais emprunté pendant l’été. Je lis, j’ouvre mes documents, j’alterne pour prendre appui, pour que le texte d’un autre me serve de tremplin. Je relis, je m’aperçois que la partie à laquelle je me suis attelée pourrait sans doute atteindre les 50 pages alors que je pensais la faire tenir sur 10, 20 maximum. Je sais que tout est là : pourquoi n’est-ce pas simple ? La part des mauvaises nouvelles, sans doute, qu’on ne peut pas effacer d’un trait.

Jeudi Grâce à un article de Pierre Ménard, je découvre ce livre, qui me servira sans doute autant pour mes ateliers à venir à Clermont-Ferrand que pour Bruits :

Je relis le début de ce semainier : "Ne pas s’empêcher le repos. Relire la partie en cours, ne pas s’affoler du travail de réécriture qui se présente". Repos ou relecture : par où donc circule l’énergie ? Ni par ici, ni par là, semble-t-il.

Posté il y a quelques jours des photos du guide de Clermont dont je voudrais me servir pour les ateliers. Une partie de la carte montre le jardin des plantes. Ce serait bien d’aller se planquer là, dans le plan. Après tout, le héros du Capital, c’est ta vie, finit caché à l’intérieur d’un arbre (pardon pour le spoiler).

Vendredi Quand c’est trop écrasant, le mieux, en réalité, c’est de travailler sur le podcast. Ecouter, enregistrer, monter, réécouter : l’énergie normale revient. L’écriture, qui en demande bien davantage, attendra.

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