Fenêtres Open Space

site d’Anne Savelli

Septembre 2020

jeudi 24 Septembre 2020, par Anne Savelli

Parfois je commente, parfois non, selon le temps ou l’envie... Disons que septembre aura été le mois des valeurs refuge (Demy, Leduc), du féminisme français contemporain (Delaume, Harmange), des actrices, toujours, du dernier film de Welles et de tout un tas de petites choses liées à des projets d’écriture
Livres

Demy Varda, essai de généalogie artistique, de Guillaume Boulangé, ouvrage selon toute vraisemblance tiré de la thèse de l’auteur, avec couverture colorée et titre relativement mensonger (la généalogie dont il est question concerne Jacques Demy. Agnès Varda n’occupe dans le livre qu’une place relativement similaire à celle d’autres artistes ayant influencé Demy ou ayant été influencés par lui). Je pense même qu’il s’agit de la thèse de l’auteur tout court car il n’y a pas eu, semble-t-il, de travail rédactionnel pour faire passer cette étude d’un cadre universitaire à un public plus large : les noms des réalisateurs évoqués, par exemple, sont écrits en capitales, les titres des films en gras, on trouve des sous-titres en a) et en b) qui me rappellent mes chères études de lettres... C’est gênant à l’œil de la lectrice lambda que je suis (re)devenue : tout choix, dans un livre, possède une signification et on est en droit, ici, de se demander laquelle, puisque rien n’est indiqué. Il faut préciser, à ce stade, que j’ai trouvé cet ouvrage aux Bien aimés, à Nantes, qui est une librairie généraliste. On dira que je pinaille, mais pas tant que ça : autant on apprend, en plus de 400 pages (+ 100 pages de notes en fin d’ouvrage et un index), beaucoup de choses sur des réalisateurs souvent passés inaperçus, autant on a du mal à saisir, s’il s’agit bien d’une thèse et non d’un ouvrage personnel, pourquoi Guillaume Boulangé se permet souvent de distribuer bons et mauvais points en fonction de ses goûts, sans argumenter. Ainsi, je serais curieuse de savoir pourquoi il est, pour lui, évident que les émissions de Roland Topor et Jean-Michel Ribes Merci Bernard et Palace sont de mauvaise qualité et ne valent pas qu’on y prête attention : merci d’éclairer ma lanterne. Il y a également au moins deux erreurs - dont la disparition de la pauvre Jane Russel dans Les Hommes préfèrent les blondes au profit d’une autre actrice, Jane Powel. Oui, je pinaille... mais pour une fois que je lis une thèse ! C’est dommage, car le style de Guillaume Boulangé est très agréable à lire et son livre, comme je l’ai dit, permet de multiples découvertes. Je critique, mais il m’a accompagné durant un nombre conséquent de petits-déjeuners et je l’ai lu de bout en bout.

Le Cœur synthétique, Chloé Delaume. Second "livre de la rentrée" que je lis après Yougoslave de Thierry Beinstingel, Le Cœur synthétique de Chloé Delaume est un roman qui fait suite à Mes bien chères sœurs, essai sur la sororité dont on retrouve des accents, en particulier à la fin. Comme l’explique Chloé Delaume elle-même, il s’agit d’une comédie grinçante sur l’âge de péremption des femmes qui se retrouvent sur le marché du célibat arrivées en fin de quarantaine (j’avais commencé par mettre des guillemets à ces termes, péremption, marché, et puis non). En toile de fond, elle esquisse une satire de l’industrie du livre et d’un certain milieu de l’édition (je n’ai pas tout reconnu car je n’en fais partie que par intermittences, mais ça m’a bien fait rire). Écrit tambour battant, Le Cœur synthétique se lit d’une traite. Son énergie, son humour, la tendresse de l’autrice pour ses personnages permettent, je crois, de les accompagner dans leurs quêtes, que la situation nous soit proche ou non. Quelque chose, cependant, m’a laissée par moments sur le bord de la route : le côté normé, fleur bleue, de la plupart des héroïnes vis-à-vis des hommes (j’ai la même impression quand je lis des romans de Virginie Despentes). Ces femmes semblent ne pouvoir envisager avec eux que des relations monolithiques. L’homme potentiel est fantasmé, désiré, soit comme mari, soit comme amant, point. Il n’y a pas de jeu possible entre ces notions, nul moyen d’y ajouter une forme d’amitié, par exemple, qui exempterait l’autre de la valeur ajoutée qu’il ou elle est censé.e apporter, au sein du couple, à la société tout entière qui validera ou non cette valeur (beauté, jeunesse, richesse, statut social, sécurité, aura, etc) (au passage, avez-vous remarqué que, depuis dernières années, le verbe valider est employé à toutes les sauces ?) Bref. Cette norme est déjouée à la fin par la sororité, certes, mais n’est jamais, au fond, interrogée de l’intérieur. Comment, dès lors, dynamiter ses bases, ces injonctions qui semblent aujourd’hui encore enjoindre les petites filles, les jeunes filles, à se conformer à ce type d’attente ? (il n’y a qu’à regarder la télé, les jouets dans les magasins, les unes des journaux, j’en passe, pour se sentir coincé.es dans les années 50, comme si rien ne s’était produit) Notant ces impressions, je me demande s’il ne faudrait pas que je l’écrive un jour, ce livre que j’espère.
Personnes, Christian et Christophe Boltanski (lu)
Le Peigne-cocotte, Fred Léal (lu)
La Bombe, Frank Harris (lu)
En remontant Belleville, François-Xavier Bouchart (lu)
Violette Leduc : genèse d’une œuvre censurée, sous la direction d’Anaïs Frantz (commencé)
Moi les hommes, je les déteste, Pauline Harmange (quand je pense qu’un imbécile a essayé de faire interdire ce livre... Pour la peine, il passe de Monstrographe, la maison d’édition de Coline Pierré et Martin Page, aux éditions du Seuil)
Les Lionnes, Lucy Ellmann (commencé)
Comment je ne suis pas devenu poète, Hubert Antoine (commencé)
Dans la dèche à Paris et à Londres, Georges Orwell (commencé)

Films
Le Dernier métro, François Truffaut (revu)
L’Amour c’est gai, l’amour c’est triste, Jean-Daniel Pollet
Diamants sur canapé — Breakfast at Tiffany’s, Blake Edwards (revu)
De l’autre côté du vent, Orson Welles
Le Doulos, Jean-Pierre Melville (revu)
Mon oncle d’Amérique, Alain Resnais (revu)

Documentaires
Ils m’aimeront quand je serai mort, Morgan Neville (sur le dernier film d’Orson Welles, De l’autre côté du vent)
Citizen Jane, l’Amérique selon Fonda, Florence Platarets
Audrey Hepburn, le choix de l’élégance, Emmanuelle Franc
Isabelle Huppert, message personnel, William Karel
L’Ultime création, documentaire sur Mylène Farmer ultimement lisse.
Jean-Paul Gaultier se défile, documentaire de Loïc Prigent

Poscasts, émissions de radio

Le coeur synthétique de Chloé Delaume, L’heure bleue, Laure Adler, France Inter

La séparation, de Sophie Simonot, podcast natif des Pieds sur terre, France Culture, en 7 épisodes. Écouté d’un seul tenant, soit durant 3h30. Depuis, de nombreuses choses me sont restées en tête. Il s’agit d’un documentaire qui suit, pendant une vingtaine d’années, un couple avec lequel la réalisatrice est amie et qu’elle revoit à différentes périodes de leur vie. Dès le départ, on sent que quelque chose ne fonctionne pas entre Manue et Karim, qui se connaissent depuis longtemps au moment où ils se marient. Au fil du temps, on est de plus en plus glacé parce qui ce qu’ils disent et taisent lorsqu’ils évoquent leur histoire commune et les reproches, en apparence dérisoires, qu’ils se font. Et on finit par se rendre compte d’une chose très étrange : l’absence d’empathie que l’un comme l’autre provoquent, même une fois mis à jour les rouages familiaux qui les ont eux-mêmes broyés. Drôle d’expérience d’écoute...

Galerie

Cliquez sur une photo pour avoir le diaporama

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.