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Avec ou sans images

dimanche 30 Juillet 2023, par Anne Savelli

Quelques mots rapides, en ce mois de juillet mis en vacances, pour dire de quoi seront probablement faits certains semainiers de la rentrée : une réflexion sur le bruit, toujours (je l’espère, du moins) mais également sur les images. J’en ai déjà parlé ici : je suis en train de me constituer un "petit théâtre" afin de matérialiser, visuellement, mes scènes de Bruits. Mais il n’y a pas que ça : d’octobre à mai, j’animerai des ateliers d’écriture à l’Université de Clermont-Ferrand sur le thème "littérature et images", justement, et espère me servir de cette occasion pour creuser la question.

Je vois bien en quoi, par exemple, depuis derniers temps, je place certaines images à distance et vais, pour moi seule, en convoquer d’autres. Il y a déjà longtemps que je ne me sers plus d’appareil-photo (le dernier a rendu l’âme il y a plusieurs années et je n’ai pas cherché à le faire réparer) car j’ai, comme beaucoup, choisi d’utiliser mon téléphone par commodité : pour capturer quelque chose de l’instant et, souvent, le "partager" sur les réseaux sociaux. Mais justement, j’en ai marre. Depuis un moment, pour pouvoir en profiter mieux, je prends beaucoup moins en photo les lieux par lesquels je passe, par exemple. Ce n’est pas une interdiction rigoriste que je me fais, que je m’oblige à suivre : ainsi, la bibliothèque prise à la volée ci-dessus, je savais que je serais contente d’en conserver le souvenir plus d’un instant. Je collectionne aussi les photos de serres, de jardins botaniques. Mais j’ai envie de désamorcer le réflexe voir quelque chose de neuf / le photographier / le mettre en ligne sur les réseaux sociaux / attendre les réactions.

(Que fait ce samouraï dans cette bibliothèque de curés à la retraite ?)

Les réactions ne sont souvent que des "likes" et j’ai bien repéré, en me coupant des réseaux sociaux une semaine, qu’à distance, la question de savoir qui a liké quoi n’a plus d’importance. Par ailleurs, je me rends compte que, spontanément, je suis en train de mettre en "sourdine" les comptes Instagram qui partagent trop, trop souvent. Quand l’envoi d’une image ne sert que de ponctuation (le syndrome "ouf, j’ai fini telle tâche, je poste une photo pour sentir que j’ai terminé", comme s’il s’agissait d’un point à la fin d’une phrase), je trouve qu’on ne réfléchit pas assez à la façon dont elle sera reçue. Qu’est-ce qu’on partage, au fond ? À quel moment on se demande si l’image apportera quelque chose à celle ou celui qui la reçoit ? (Déjà : qui est cette personne qui reçoit ? Choisie par l’ algorithme, elle reste relativement aléatoire.) C’est moins l’image en elle-même qui me pose question, que le côté systématique. Autant je reste amusée par ce que rassemble le groupe Facebook Marilyn everywhere, dont l’ostentation est inexistante, autant j’aime les comptes pour lesquels l’image, en elle-même, a une vraie valeur, autant la répétition de mises en scène quasi "automatiques" (je suis là, je lis ça = je photographie) m’use les yeux, et donc, me fait réfléchir.

Pour autant, je sais bien que nous sommes plus qu’invité.es à nous transformer en nos propres attaché.es de presse et ne pouvons y échapper. Cependant, au moment où je décide de quitter Twitter, réseau que je fréquente depuis quasiment ses débuts, réseau sans photo, à la base, et mesure ce qui va me manquer (le compte de Claro, par exemple), j’ai envie d’en profiter pour réfléchir à ce fonctionnement dans lequel on nous force, peu ou prou, à perpétuellement nous situer.

En attendant, commençons peut-être par aller regarder par ici (grâce à Pierre Ménard, merci pour la découverte) :

Galerie

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