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Huis-Clos

dimanche 7 Juillet 2024, par Anne Savelli

Plus les jours de cette semaine passent, plus la situation politique me plonge dans une telle déprime que je n’ai plus envie ni de parler, ni de manger, ni de sortir. Je me pousse tout de même à le faire, sortir en continuant à me rendre aux Buttes, parler en réalisant le prochain épisode de Faites entrer l’écriture, qui paraîtra le 25 juillet.

Il y a aussi la découverte, à Beaubourg, de l’artiste Vera Molnar, morte à 99 ans cet hiver, et dont j’ignorais l’existence. Venue pour la rétrospective Brancusi, dont c’était le dernier jour, je suis repartie avec cette "pionnière de l’art numérique", comme le dit le site du musée, en tête, une Française d’origine hongroise - "binationale", tiens...

("journaux intimes" de Vera Molnar)

Il y a des oeuvres qui nous bouleversent et semblent s’adresser à nous directement. Dans la salle, face à elles, nous nous foutons bien, alors, de savoir si elles ont été validées, dûment reconnues un jour, et par qui. Je dis cela, mais c’est en partie faux, bien sûr. Si rien ni personne ne m’a jamais parlé de Vera Molnar, pas plus dans le musée qu’au-dehors, le choix des oeuvres, la façon dont elles sont exposées, ce qui est dit à leur propos, tout vient renforcer cette émotion, que je crois première, et qui est sans doute plus composite. Ainsi, la dernière oeuvre que l’on peut voir, juste avant de sortir, Huis-Clos, et que je n’ai pas osé photographier, a été réalisée alors que l’artiste était recluse en maison de retraite, juste avant sa mort. On peut y lire "simplement" des lettres, HC. On peut, ayant lu le court texte qui l’introduit, admirer cette femme qui a créé - et avec quelle force - jusqu’au dernier instant. On peut encore sentir son coeur se serrer, se demander pourquoi on n’a jamais entendu parler d’elle avant (uniquement par manque de culture ?), méditer sur sa disparition, juste avant ses 100 ans et l’ouverture de cette exposition.

Je suis si profondément déprimée, au moment où j’écris ces mots, que je n’ai même pas envie d’expliquer ce qui, dans l’oeuvre de Vera Molnar, me touche. Peut-être parce qu’une partie de mon pays montre en ces jours sa haine des femmes, des "binationaux", des artistes. Quand je n’arrive plus à écrire (et là, cette semaine, attendant dimanche, comme tout le monde, au bout d’un moment, je n’y arrive plus), je lutte pour ne pas perdre pied. Plonger dans la lecture, le travail, la colère. Puiser partout des raisons de ne pas désespérer. Au bout d’un moment, ne plus y parvenir. Je termine mon épisode de podcast en me disant qu’il risque d’être assez particulier, à écouter, celui-là, le moment venu.

Et puis, mentalement, le temps d’une image, je me tire au Japon.

Le soir, je lis la partie "création" du mémoire qu’une étudiante de Clermont m’a envoyé. Certains passages me redonnent du courage et je l’en remercie.

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